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écrivain voyageur anthropologue curieux

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Maria Maïlat - écriture-lecture-traduction, poésie, anthropologie et philosophie


Le chemin que je dois prendre

Publié par Maria Maïlat sur 4 Août 2017, 11:30am

Nous sommes en août. Je lis Walter Benjamin, Adorno. Puis, de la poésie. Je dors et je lis de nouveau. Je flâne en vélo. heureuse d'avoir cette double liberté: flâner dans l'espoir des livres et dans les paysages où poussent encore quelques plantes en voie de disparition.  Comment préparer autrement  cette “assistance” sans mesurer les risques que l’institution portent dans ses fondations, indépendamment de ceux qui la gouvernent? 

J’essaie de remonter vers les sources de cette institution nommée “aide sociale à l’enfance et à la famille”, souvent réduite à une formule comme un bloc de marbre abstrait :  “protection de l’enfance”.

Il me faut une tristesse incommensurable pour pouvoir affronter l’entreprise que je me suis donnée dans cet exil : modifier le processus qui fabrique le destin des enfants des vaincus pris dans les dispositifs et les meures. Depuis 25 ans je fais des "pas de côté" sur ce chemin. Parfois, je tombe dans un fou rire. Parfois, souvent, c'est l'abîme.  Aujourd’hui encore, je suis obligée de me trouver dans le groupe des vainqueurs qui s’arrogent le pouvoir de marcher sur les enfants des vaincus depuis des siècles. Leur leitmotiv est la demande d’encore plus de moyens pour marcher sur ces corps sans même les apercevoir. L’institution fonctionne avec ses rouages sans arrêt, sans issue, sans espoir.  On a beau à changer les lois, le processus ne change pas, bien au contraire, il devient plus raffiné et banalement plus meurtrier. Ce processus se nourrit de théories fabriquées et imposées dans les formations des travailleurs sociaux par ce pouvoir dominant dont la perversité gagne en intensité. Le processus intègre les mécanismes de sélection des ceux qui parviennent au pouvoir afin que la reproduction ne soit pas mise en danger en aucun cas. 
Parmi les mécanismes qui continuent à tourner comme "neuf", il existe un particulièrement pervers : les vainqueurs extirpent des larves de la masse des vaincus pour leur faire ânonner des louanges à l’adresse de l’institution et de son pouvoir de “protection” ou de “sauveur”. Comme si les louanges de quelques “exemples” extirpées de la masse des enfants broyés pourraient servir l’institution, alors qu’elle est parfaitement servie par ses propres employés/salariés. Ses “figures” tirées de la masse des enfants des vaincus sont utilisées pour renforcer ce même processus fatal, inextinguible qui continue d’abattre les enfants des vaincus sacrifiés pour que le processus se répète à l’infini. N’est-ce pas cela la définition de l’enfer ? Mais une enfer où la banalité du mal est devenue comme l’oxygène, on ne peut même plus s’en passer, on en redemande ("encore plus de moyens"!).

Qui sont ces vainqueurs ? Ils ne sont que des spectateurs/observateurs dans la caverne de Platon, rivés à la peur et à la fabrication des malheurs ; des observateurs effrayés par ce que le processus fabrique et sans aucune conscience de leur propre pouvoir de s’opposer à ce processus, de l’arrêter. Ils organisent la masse déchue des “cas” éjectés au dehors de l’humain, dans le pathologique et le criminel. La fabrication de cette masse enfantine pathologique et criminelle de vaincus leur salit les yeux, les oreilles, le visage. Certains deviennent eux-aussi des larves, leurs propres ombres les fait pleurer devant leurs chefs. Parfois, ils tombent eux-aussi dans les rouages des dispositifs et des mesures avec un “brun-out” ou sans. Les vainqueurs sont les personnages d’un cauchemar dont ils sont les metteurs en scène. Leur propre travail est nécessaire pour que les dispositifs et les mesures perpétuent la production de la masse des vaincus de génération en génération. Une production où la théorie sert de fétiche et d’oracle. Mais de la bouche de ces Sibylles en réunion de synthèse ne sort que la fin du monde, la prédiction des catastrophes qui doivent forcement se réaliser puisqu’elles servent le processus de reproduction d’un destin qui destine l’enfant de la vie humaine. L’institution divine de la “protection de l’enfance” n’a pas changé ses fondamentaux depuis le temps où les enfants des parents “indigents”, “voleurs”, “alcooliques” ou “criminels” étaient enfermés dans les prisons, les hospices ou les couvents. Le processus assigne à l’enfant des vaincus un destin sans vie. L’enfant est fermé dans un cas, lieu d’expression des troubles, des symptômes qui justifient qu’il soit broyé, éjecté hors vie normale, hors accès à une vie ordinaire. le seule moment de vérité dans ce processus est le moment où le travailleur social prend conscience que jamais il n’accepterait que son propre enfant soit “pris en charge”; “aidé”, “éduqué” dans les dispositifs pour lesquels il demande encore plus de moyens, encore plus de la même chose… Mais heureusement, se dit-il, ses dispositifs concernent les enfants des autres. 

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